La « saga » des négociations et des signatures de l’accord d’intéressement commun 2009-2011 vient de s’achever (prendre connaissance du texte intégral de l’accord). Comme dans toutes les (mauvaises) séries, il y aura certes (et c’est heureux!) des gagnants, mais également beaucoup de perdants! Ces derniers devront se contenter, pour tout lot de consolation, de la bonne parole du Directeur Général et de belles promesses pour les négociations à venir…

La CFTC a étudié, avec le plus grand sérieux, les engagements, jetés à la hâte, lors du dernier CMPC, par un Directeur Général visiblement pressé d’en finir.
Ils sont de deux ordres:

1) L’engagement de verser une indemnité différentielle à ceux des salariés dont la prime d’intéressement 2010 serait, « toutes choses égales par ailleurs », inférieure à celle qu’ils ont perçue en 2009;

2) L’engagement de rouvrir des négociations, à la rentrée de septembre, sur la prise en charge des CESU (« chèques emploi service universel », des remboursements de transports et sur la mise en place d’un PERCO.

L’engagement de verser une indemnité différentielle à ceux des salariés dont la prime d’intéressement 2010 serait, « toutes choses égales par ailleurs », inférieure à celle qu’ils ont perçue en 2009;

En premier lieu, la CFTC observe qu’en formulant cet engagement, la Direction Générale reconnait, du moins implicitement, qu’un certain nombre de salariés seront pénalisés par ce nouvel accord d’intéressement, alors même que la DRH fédérale soutenait aux partenaires sociaux lors des négociations, statistiques à l’appui, que personne n’y perdrait.

Nous concevons aisément que l’employeur soit tenu par une gestion budgétaire contrainte, mais pourquoi diable tenter de nous faire prendre des « vessies pour des lanternes »?

En deuxième lieu, il faut noter que cet engagement revêt un caractère général et non individuel. Autrement dit, la Direction Générale se réserve la pleine opportunité d’estimer, en fonction de ses seuls éléments d’appréciation, dans quel cas une prime 2010 inférieure à celle perçue en 2009 « mériterait » une compensation.
Bien sûr, cet examen sera soumis aux signataires à l’occasion de la commission de suivi de cet accord. Mais, quelle sera leur marge réelle d’opposition si la Direction, au gré de nouvelles contraintes financières ou simplement par volonté de limiter l’évolution de sa masse salariale, estime n’être tenue par aucune obligation de compenser les pertes éventuelles?

D’ailleurs, comment, objectivement, comparer deux primes dont le mode de calcul est différent?

En 2009, la prime était calculée, à part égale, en proportion du salaire et du temps de présence individuelle dans l’année.

En 2010, la prime sera calculée, pour 55% en fonction du temps de présence et pour 45% en fonction du salaire.

Si nous prenons l’expression « toutes choses égales par ailleurs » à la lettre, nous serions tentés d’en conclure qu’au moment même où l’engagement de la Direction est tenu, il ne pourra pas être appliqué puisque plusieurs paramètres vont changer en 2010, par rapport à 2009…

En troisième lieu, il faut également observer que si, malgré nos doutes, compensation il y avait, elle prendrait la forme d’une prime, nécessairement soumise à cotisations et imposable.

L’engagement de rouvrir des négociations, à la rentrée de septembre, sur la prise en charge des CESU (« chèques emploi service universel », des remboursements de transports et sur la mise en place d’un PERCO.

L’examen de ces engagements, rajoutés in extremis par la Direction générale pour venir au secours du seul signataire initial, ne mérite vraiment pas de grands développements, tant ils sonnent comme de vraies-fausses avancées.

La réouverture des négociations sur la prise en charge des CESU et des transports est un serpent de mer qui trouve son origine dans le protocole d’accord de fin de conflit signé en mai 2008 (en savoir plus). Ces négociations ont déjà été lancées en 2008, puis refermées aussitôt par une Direction qui affirmait à l’époque, en relisant, en séance, devant des partenaires sociaux ébahis les termes mêmes du protocole d’accord, qu’elle avait bien tenu son engagement en « ouvrant des négociations… », sans aucune obligation de résultats. Dont acte!

Elle tente aujourd’hui de nous rejouer la partition en s’engageant à tenir ses engagements de mai 2008. Constructif ne rime pas avec naïf. La CFTC est constructive, pas naïve.

Quant au second serpent de mer constitué par la mise en place d’un PERCO (plan épargne de retraite collectif), il faut là aussi garder bien présent à l’esprit qu’indépendamment des positions des uns et des autres sur le dispositif lui-même, l’obligation légale d’ouvrir des négociations sur la mise en place d’un PERCO pèse sur l’employeur depuis la loi n°2006-1770 du 30 décembre 2006 (En savoir plus.). Présenter cet engagement comme une avancée, c’est un peu comme affirmer que le désert est rempli de sable.

Plus sérieusement, mettre en parallèle le dispositif d’intéressement et la mise en place d’un PERCO, c’est, pour nous, confondre deux dispositifs présentant des finalités très différentes. Le premier, l’intéressement, concoure à l’amélioration du pouvoir d’achat à court terme. Le second, le PERCO, est destiné (du moins en théorie) à améliorer le pouvoir d’achat futur.

Si l’idée de la Direction, et d’autres partenaires, consiste à rassurer ceux des salariés qui perdront du pouvoir d’achat par la baisse de leur intéressement, en leur promettant un gain futur de pouvoir d’achat par la souscription d’un PERCO, c’est un peu comme montrer une glace à un enfant qu’il ne pourra manger qu’une fois adulte!


Pour toutes ses raisons (et pour celles antérieurement évoquées ici), la CFTC a pris ses responsabilités en refusant de signer cet accord d’intéressement. Nous regrettons que l’harmonie syndicale présente au démarrage des négociations se soit effritée au fil des manoeuvres de la Direction, même si nous savons bien que les logiques pré ou post-électoralistes finissent, pour certains, par prendre le pas sur les convictions premières.

La CFTC estime que les partenaires sociaux ont manqué, dans ces négociations, l’occasion de conclure un accord porteur d’un véritable progrès social pour tous, c’est à dire un accord où l’avantage des uns ne se construit pas au désavantage des autres. Ce n’est en tout cas pas le meilleur moyen d’impulser l’idée d’une seule et même communauté d’intérêt à la Caisse des dépôts, à moins que les plus ardents défenseurs de l’harmonisation public/privé n’aient ommis de préciser que cette harmonisation supposait, à leurs yeux, une totale solidarité financière!