La Sécu, tout le monde connaît. Sa mise en acte annuelle, à travers le PLFSS (projet de loi de financement de la Sécurité sociale), en revanche, passe quasiment inaperçue. C’est pourtant bien au moment de son élaboration, puis de son vote, que l’essentiel de notre protection sociale se joue.

Et cette année, l’enjeu est particulier : la crise sanitaire a en effet creusé les comptes dans des proportions inédites. Pour la CFTC, c’est l’occasion de rappeler que ce contexte exceptionnel n’explique pas seul le déficit.

Face à la crise du Covid-19, la Sécurité sociale a, une fois de plus, pleinement assumé son rôle d’amortisseur social, nous permettant d’éviter la déroute économique et la catastrophe sociale qui frappent de trop nombreux pays. Cela, toutefois, au prix d’un déficit hors normes. Non seulement les dépenses ont été exceptionnelles, pour assurer l’accueil dans les hôpitaux, pour l’achat de tests, pour le soin des malades…, mais, en plus, les recettes ont été considérablement amoindries par la baisse de l’activité (l’activité salariée, en France, se traduit par des cotisations, qui abondent, notamment, les comptes de la Sécurité sociale) ! Une telle situation appelle une action à la hauteur des enjeux, et, dans ce cadre, la CFTC défend une approche stratégique du plan de relance, visant la montée en gamme de nos produits et services.

L’augmentation des recettes de la Sécu passe par une montée en gamme de l’économie française

En demandant qu’un objectif de montée en gamme de l’économie française soit associé au plan de relance, la CFTC opte pour la mise en place d’un cercle vertueux : des salariés plus qualifiés donc plus compétents créeront davantage de valeur. L’augmentation corollaire de leurs revenus se traduira par des cotisations plus élevées, donc par des recettes supplémentaires pour la Sécurité sociale. Ce qui, par ailleurs, limiterait le report du déficit sur les générations à venir.

Pour que ce tournant soit rendu possible, il est néanmoins impératif que les aides d’Etat directes ou indirectes, prévues par le plan de relance soient assorties de conditions.

Forte de ces principes, la CFTC a fait part de son analyse du PLFSS 2021 lors des séances dédiées des conseils d’administration de chaque branche de la Sécurité sociale : assurance maladie, famille, assurance vieillesse, accidents du travail et maladie professionnelle, recouvrement… sans oublier l’autonomie, créée cette année.

6 branches, 6 budgets pour maîtriser les dépenses sociales et de santé

Branche recouvrement :

L’influence, indiscutable, de la crise sanitaire sur les comptes de la sécurité sociale ne doit pas masquer l’effet avéré, cumulé sur plusieurs années, des politiques d’exonération, non compensées par l’Etat, sur le creusement du déficit.

Les assiettes de cotisations sociales ont en effet été réduites par le législateur, prétextant un effet supposé de dynamisation de l’économie. Ces réductions ont généralement pris la forme d’exonération de cotisations patronales. Les gouvernements successifs, à l’annonce de ces dispositions, ont garanti aux partenaires sociaux que l’Etat compenserait, chaque année, le manque à gagner pour la Sécurité sociale (en lui attribuant une ligne budgétaire spécifique dans son projet de loi de financement). Or, cette compensation n’est jamais opérée systématiquement ou intégralement. Pour la CFTC, ces manquements, face à la crise que nous traversons, doivent cesser.

 Branche Maladie

  • Faire peser l’intégralité du plan de reprise de la dette des hôpitaux sur les comptes de la Sécurité sociale ne rend pas justice à la situation qui fut celle du monde hospitalier au cours des derniers mois. L’Etat doit prendre sa part dans l’opération de désendettement, qui aurait pu très bien faire l’objet d’un volet dédié du plan de relance. Ce plan ne vise-t-il pas à remettre le pays d’aplomb à la sortie de la crise sanitaire ? L’endettement de l’hôpital en fait partie intégrante.
  • Lors de la crise, le recours à la téléconsultation médicale s’est considérablement accéléré. C’est une bonne chose, et cette expérience doit contribuer à la réflexion sur le monde médical de demain. La CFTC salue la poursuite d’une prise en charge à 100 %, par l’assurance maladie, des téléconsultations, mais elle souhaite également qu’une participation des complémentaires santé soit étudiée.

Branche autonomie

La CFTC salue la création d’une branche dédiée à l’autonomie, mais note que le 1,4 milliard d’euros dévolu à la revalorisation salariale des personnels des EHPAD est très en-dessous des attentes du secteur. Une double contradiction, dans un contexte de vieillissement de la population, impliquant des besoins croissants, alors que l’attractivité des métiers de l’autonomie est très faible, parce que les conditions de travail sont très difficiles. Nous aurons un grand besoin de ces salariés dans les années qui viennent, le secteur doit devenir attractif pour recruter davantage.

Branche ATMP

Parallèlement à la séance spéciale du conseil d’administration de la branche, la CFTC avait fait part de sa position concernant la reconnaissance comme maladie professionnelle des affections liées au Covid-19.

Branche Vieillesse

Pour la CFTC, la situation de certains retraités modestes relève de plein droit de l’urgence sociale. Une augmentation progressive du minimum de pension doit être entamée au plus vite, afin que celui-ci atteigne rapidement 100 % du SMIC !

Branche Famille

Pour la CFTC, l’allongement du congé paternité est un signal positif qui permettra d’impliquer davantage le père, dès l’arrivée d’un enfant dans le foyer, mais aussi de rééquilibrer le partage des tâches nouvelles consécutives à la naissance. Cette évolution pourrait nous mener vers une meilleure conciliation des temps de vie pour les deux parents.

Le congé paternité est effectivement doublé, passant de 11 à 25 jours (de 18 à 32 en cas de naissances multiples).  Ce congé devient en partie obligatoire. Ce n’est pas dans la philosophie de la CFTC qui est fondamentalement attachée au libre choix des parents en ce qui concerne leur organisation familiale, d’autant plus que le flou demeure sur les conséquences financières du congé. Rendre un congé obligatoire assorti d’une perte de rémunération ne serait pas la façon la plus incitative d’impliquer les pères auprès de leurs enfants dès les premiers jours de leur vie et pour la suite.

Aussi, plutôt que de préconiser la contrainte et ses effets contre-productifs, la CFTC préconise une mesure mettant en place une obligation pour les employeurs d’informer les pères de leurs droits quant au congé paternité mais aussi aux autres congés familiaux.